« Time to Act » est un programme lancé le 27 mars dernier, dans les provinces de Ratanakiri et de Stung Treng, par Plan International Cambodia, une ONG qui consacre son action à la protection des enfants. Le programme vise à réduire le taux d’abandon scolaire et le nombre d’adolescentes exposées au risque de mariage forcé et de grossesse précoce.
“Time to Act”, un programme contre le mariage d’enfant
Lancé en janvier 2023, le projet vise à autonomiser près de 2,5 millions de filles, en particulier des adolescentes et des jeunes femmes, de 16 communes cibles, en presque deux ans.
Ainsi, le projet devrait bénéficier directement à 5 327 femmes de plus de 18 ans et à 3 361 filles en améliorant leur environnement scolaire afin de réduire le risque de mariages et unions d’enfants, précoces et forcés (CEFMU).
Les deux provinces du Nord-Est du Cambodge choisies pour implanter et tester le programme présentent le taux le plus élevé de mariages précoces dans le pays.
Selon une étude de référence menée en 2020 par l’organisation, 48 % des filles de Ratanakiri sont mariées avant l’âge de 18 ans, dont 8 % avant même d’avoir atteint l’âge de 15 ans. Le taux de la province de Stung Treng est tout aussi préoccupant, puisque 25 % des adolescentes sont mariées avant l’âge de 18 ans.
Kim Than, directeur adjoint des programmes de Plan International Cambodia, a indiqué que de nouvelles études statistiques sur les mariages précoces devraient être publiées en juin, ce qui permettrait de mieux comprendre le problème à l’échelle nationale. La pandémie ayant entraîné des fermetures d’écoles prolongées dans tout le pays, ces nouvelles données pourraient être encore plus préoccupantes. Aussi, si nécessaire, le projet « Time to Act » pourrait être étendu à d’autres provinces vulnérables du Royaume.
Le projet commencera par l’organisation de deux ateliers dans les zones ciblées, qui seront suivis de diverses actions, allant de la promotion de l’éducation dans les ménages pauvres à la formation sur la reproduction et la prévention des grossesses précoces.
Ce programme permettra également aux adolescentes âgées de 12 à 18 ans de mieux comprendre comment exercer leurs droits pour se protéger des agressions sexuelles et de la violence fondée sur le genre.
Vers une autonomisation des femmes
Le programme vise également à donner aux filles et aux femmes les moyens d’être plus indépendantes.
En effet, en raison de leur situation familiale et des difficultés d’études qu’elles rencontrent, certaines filles décident de se marier avant la fin de leur scolarité.
“Nous avons discuté avec le groupe de jeunes bénévoles de la communauté qui nous ont rapporté que la majorité de leurs amis avaient décidé de se marier et d’abandonner l’école”, a déclaré Kim Than.
De plus, il s’avère que bien souvent dans les zones rurales, les hommes sont considérés comme les seuls soutiens financiers de la famille.
Le directeur adjoint explique notamment que “les filles doivent se marier tôt pour être entretenues par des hommes, comme le veut l’ordre social. C’est pour sortir de cette dépendance financière que nous leur proposons aussi à travers ce programme une formation professionnelle afin qu’elles puissent acquérir les compétences nécessaires pour gagner leur vie”.
La sensibilisation à leurs droits, l’accès aux services de santé reproductive et la transmission de connaissances sur la manière de préserver leur santé sont également au centre des préoccupations de l’association.
Le projet s’adresse non seulement aux filles, mais aussi aux garçons, afin d’élargir la compréhension du problème. Kim Than a déclaré qu’il n’était pas possible de s’attaquer au problème des inégalités entre les hommes et les femmes en travaillant uniquement qu’avec elles :
« Si les hommes ne comprennent pas les questions de genre, comment peuvent-ils soutenir les femmes dans leur autonomisation ? Pour résoudre le problème des mariages précoces, notre projet vise à travailler avec les deux sexes. Lorsque les garçons comprendront les sources de ce phénomène, ils soutiendront les filles et s’efforceront également de terminer leurs études”.
Des facteurs socio-économiques multiples
Selon Gwynneth Wong, directrice nationale de Plan International Cambodge, les abandons scolaires et les mariages et unions précoces ou forcés restent les principaux problèmes qui entravent le développement des adolescentes.
« Les filles les plus à risque sont souvent celles qui viennent de familles pauvres, de groupes marginalisés et de zones rurales« , a-t-elle déclaré. « Le mariage d’enfants a souvent des conséquences négatives graves, privant des millions de filles de la possibilité de réaliser leur potentiel dans le monde entier”.
Le manque de soutien à l’éducation, les tensions financières et les croyances traditionnelles de la communauté et des parents sont autant de facteurs qui peuvent conduire au mariage d’enfants.
Selon Kim Than, certains parents veulent que leurs filles gagnent de l’argent pour la famille, ce qui les oblige à se marier à un âge précoce.
Le directeur adjoint a exprimé l’espoir que la population locale participe au projet pour aider à résorber le problème des mariages d’enfants. Il a toutefois reconnu que certains obstacles pourraient ralentir, voire entraver le bon développement du projet.
Le programme propose en effet une formation professionnelle de six mois, à laquelle certaines filles ne pourront peut-être pas participer pour des raisons de sécurité, de temps ou de restrictions parentales.
Beaucoup de travail doit encore être fait, en particulier avec les parents, car certains d’entre eux restent attachés à leurs croyances et à leurs traditions, ce qui empêche leurs enfants de profiter de l’opportunité offerte par l’association.
Teng Yalirozy
Avec l’aimable autorisation de Cambodianess, qui a permis de traduire cet article et ainsi de le rendre accessible au lectorat francophone.
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