Le Cambodge est le pays des merveilles. Sa culture et son histoire ont produit bon nombre de contes qui, comme ailleurs, possédaient une morale. LePetitJournal.com vous propose de découvrir aujourd’hui le conte de la graine de moutarde, dont la conclusion reste actuelle, ce qui est le propre des grands classiques.
Il y avait une jeune fille nommée Kessa-Godami, qui se maria avec le fils d’un homme riche. Elle en eut un enfant, un très beau garçon qu’elle aimait extrêmement. Quand ce garçon fut devenu assez grand pour courir seul, il tomba malade et mourut.
La jeune mère prit l’enfant mort dans ses bras et alla de maison en maison, demandant à ses amis de lui donner une médecine qui pût rendre la vie à son fils.
Dans la dernière, un saint homme, dans sa pitié bienveillante, lui dit :
— Ma bonne dame, je n’ai pas moi-même une telle médecine à vous donner, mais je pense que je connais quelqu’un qui en a une.
— Ayez pitié de moi; dites-moi à qui il faut que je m’adresse, dit la pauvre mère.
— Allez trouver le Bouddha, répliqua le saint homme, car il peut vous donner la médecine dont vous avez besoin.
Elle alla à la recherche du grand maître, toujours portant entre ses bras son petit enfant mort. L’ayant trouvé, elle le salua humblement et lui dit :
— Maître, connaissez-vous une médecine qui peut rendre la vie à mon enfant ?
— Oui, dit le Bouddha, je sais composer un médicament qui peut rendre la vie à ceux qui l’ont perdue, mais pour le composer j’ai besoin d’une chose, allez donc chercher de la graine de moutarde et apportez-la-moi. Mais songez-y, pauvre femme, il faut que cette graine de moutarde vous soit remise par une famille qui n’a perdu ni un fils, ni un mari, ni un esclave, ni un parent.
La femme partit, pleine de confiance, toujours portant son petit mort avec elle. Les gens qu’elle rencontrait, bienveillants, lui disaient:
— Il y a ici de la graine de moutarde; prenez-en tant que vous voudrez.
Mais quand elle demandait :
— Un fils, un mari, un parent quelconque, un esclave est-il mort dans cette maison ?
On lui répondait :
— Quelle étrange question vous nous posez ? Les vivants sont nombreux, mais les morts le sont encore plus. Quelle est la maison, quelle est la famille qui n’a pas perdu l’un des siens !
Et l’un disait :
— J’ai perdu un fils.
Un autre disait :
— Nous avons perdu nos parents.
Et d’autres :
— J’ai perdu mon esclave.
La pauvre mère ne put trouver une seule maison où personne ne fût mort. Elle comprit lentement la pensée du maître et elle retourna trouver le Bouddha qui vivait dans la forêt :
— Avez-vous trouvé de la graine de moutarde ? lui dit-il.
— ô maître, lui répondit-elle, je n’en ai pas trouvé; on m’a dit partout que les vivants sont peu nombreux et que les morts sont innombrables.
Alors le maître lui dit gravement, mais avec douceur et en la flattant :
— Toutes les choses doivent passer et changer; votre grand chagrin a été celui de beaucoup de mères. Soyez donc résignée et toute pleine d’espoir, parce qu’un jour viendra où vous serez sauvée. Alors pour vous rien ne changera plus.
La pauvre mère s’en alla lentement, triste encore, mais soumise au malheur et résignée.
Source : Cambodge : Contes et légendes ; Adhémard Leclère, Léon Feer, 1895.
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