Cambodge : retour de flamme pour le poivre de Kampot

Baies de poivre de Kampot, véritable or noir cambodgien. Baies de poivre de Kampot, véritable or noir cambodgien.

Si le Vietnam est aujourd’hui le premier producteur et exportateur mondial de poivre, le Cambodge voisin peut se vanter de cultiver, dans la province de Kampot, dans le sud du pays, l’une des plus prestigieuses variétés de l’éternel compagnon du sel.

On aurait bien du mal à trouver un chef occidental capable de parler du prahok, cette pâte de poissons fermentés, élément central de la cuisine khmère. Mais on ne compte plus ceux (en France : Anne-Sophie Pic, Hélène Darroze, Olivier et Hugo Roellinger…) qui tressent l’éloge de ces baies poussant entre mer et (petites) montagnes.

Cueillies avant maturité, les grappes de poivre vert, à l’acidité très aromatique, s’utilisent fraîches, sautées au wok, où leur touche herbacée fait merveille avec les fruits de mer (comme le crabe bleu de Kep, port proche de Kampot, dont c’est la spécialité). Conservés en saumure pour voyager jusqu’à nous, les grains, à la verdeur plus salée, accompagnent viande rouge grillée ou poissons fumés.

Mais ce sont surtout les différentes étapes et techniques de séchage qui permettent à ces bijoux khmers de développer et d’affiner des arômes et des saveurs si prisés des experts, que leur piquant, plus délicat que beaucoup d’autres pipéracées, se pare de notes camphrées et mentholées, comme pour le poivre noir, d’une suavité de fruits rouges et d’orange confite, pour l’exceptionnel poivre rouge, ou d’une chaleur relevée de pamplemousse, pour le poivre blanc.

« Le poivre de Kampot revient pourtant de loin », rappelle Hay Ly Eang en contemplant les lianes feuillues des poivriers, qui s’enroulent autour des milliers de tuteurs. Hauts de 3 mètres, ceux-ci s’alignent dans l’une des plantations de Confirel, l’entreprise agroalimentaire que ce Franco-Cambodgien dirige en même temps que sa société de produits pharmaceutiques, établie à Phnom Penh. Non loin du port de Kep, donnant sur le golfe de Siam, le « Docteur Hay » a été l’un des premiers à relancer, à grande échelle, la production d’un poivre passé à deux doigts de la disparition, après des années de gloire.

« Au XIIIe siècle, les Chinois vantaient déjà les mérites du poivre du royaume d’Angkor », insiste Hay Ly Eang, en se référant aux Mémoires sur les coutumes du Cambodge, de l’explorateur chinois Tcheou Ta-Kouan. Mais c’est dans la seconde moitié du XIXe siècle que la culture du piper s’est intensifiée dans la région de Kampot.

Réputation d’excellence

D’abord à la faveur de la guerre d’Aceh (1873-1904), en Indonésie, qui voit le sultan local brûler ses plantations de poivre pour qu’elles ne tombent pas aux mains de l’armée hollandaise. Une partie de la production se serait alors déplacée dans le sud du Cambodge, où elle se développe et s’industrialise sous l’impulsion des colons français. Ceux-ci produiront jusqu’à 8 000 tonnes par an de ce qu’ils vendent sous le nom de « poivre d’Indochine ».

Il vous reste 59.63% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

{link} Ce post a été trouvé sur internet par notre rédaction voici la source Source