Au pouvoir depuis 38 ans, le Premier ministre cambodgien Hun Sen va pouvoir se présenter, une nouvelle fois, aux élections législatives de juillet sans adversaire de poids. Ce vendredi, un tribunal de Phnom Penh, non indépendant de l’exécutif, a condamné Kem Sokha, le principal opposant au régime autoritaire, à 27 années d’emprisonnement qui pourront être purgées en résidence surveillée.
Rare opposant à n’avoir pas pris, ces dernières années, le chemin de l’exil, Kem Sokha, aujourd’hui âgé de 69 ans, avait été arrêté, en pleine nuit, en septembre 2017 lorsque sa formation politique, le ‘Cambodia National Rescue Party’ (CNRP), était apparue en mesure de menacer le tout-puissant ‘Cambodian People’s Party’ (CPP) de Hun Sen aux législatives de 2018. Les autorités l’avaient alors accusé de fomenter, avec des services étrangers, dont des agents américains, une ‘révolution de couleur’ dans le royaume afin de renverser l’exécutif emmené par l’homme fort du pays. Dans la foulée, le pouvoir avait dissous son parti et le CPP avait gagné la totalité des 125 sièges du Parlement.
Interdit de rencontrer des étrangers
Reprenant les accusations du pouvoir politique, le juge Koy Sao, du tribunal municipal de Phnom Penh, a expliqué, ce vendredi, que Kem Sokha avait été reconnu coupable de collusion avec des puissances étrangères. Il a précisé qu’il n’aurait donc plus le droit de mener la moindre activité politique, qu’il serait interdit de vote et ne serait plus autorisé à rencontrer des personnes extérieures à sa famille, qu’elles soient cambodgiennes ou étrangères.
Pour ‘prouver’ qu’il avait tenté de monter un ‘grand complot’ contre le pouvoir, la justice avait présenté une vidéo de l’un de ses discours prononcé en 2013 devant la communauté cambodgienne de Melbourne, dans lequel l’élu proposait d’obtenir des conseils de groupes pro démocratie américains. Elle avait aussi diffusé, dans les médias contrôlés par le pouvoir, une photo montrant sa fille dînant avec un journaliste américain auteur d’un livre sur Samsung. Dénonçant une parodie de justice, l’avocat de Kem Sokha, Ang Udom, a déclaré aux journalistes qu’il ferait appel dans un délai d’un mois.
Dès l’annonce du verdict, de nombreuses organisations de défense des droits de l’Homme ont appelé à la libération immédiate de l’opposant. « Il était évident dès le départ que les accusations portées contre Kem Sokha n’étaient rien d’autre qu’un stratagème à motivation politique du Premier ministre Hun Sen pour mettre sur la touche le principal leader de l’opposition cambodgienne », a expliqué Phil Robertson, le directeur adjoint pour l’Asie de Human Rights Watch. « La justice cambodgienne a une nouvelle fois fait preuve d’un manque d’indépendance ahurissant en condamnant Kem Sokha sur la base d’accusations sans fondement et motivées par des considérations politiques », a confirmé Ming Yu Hah, le directeur régional adjoint d’Amnesty International.
Une dérive progressive
Présent, au tribunal, aux côtés de plusieurs diplomates occidentaux, l’ambassadeur des Etats-Unis s’est déclaré, lui, « profondément troublé » par la condamnation de Kem Sokha et a appelé Phnom Penh à s’engager à « construire un système démocratique ».
Au fil de son règne, débuté lorsqu’il a été placé, en 1985, à la tête du pays par l’armée vietnamienne qui avait pris le contrôle du Cambodge en chassant les Khmers Rouges en 1979, Hun Sen, lui-même ancien soldat du mouvement extrémiste de Pol Pot, n’a cessé de durcir sa mainmise sur le pouvoir. Il a progressivement fait condamner ou fait fuir les principaux opposants à son régime, les militants pro démocratie jugés hostiles et fait fermer les médias qu’il trouvait trop critiques . Aimant à répéter qu’il va rester en poste jusqu’en 2028, il a déjà indiqué que l’un de ses fils Hun Manet, actuellement chef des armées, devrait lui succéder.
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