Améliorer la condition des femmes au Cambodge, un objectif de longue date

Lorsque nous pénétrons dans l’enceinte du centre de développement, le calme règne. Le soleil chauffe les pierres de la cour et nos visages tandis que nous nous aventurons dans les bâtiments de couleur jaune du centre de développement de Pursat.

Progressivement, des sons répétitifs de machinerie nous parviennent. Nous découvrons une pièce dans laquelle trois femmes sont occupées à tisser des kramas, foulards traditionnels cambodgiens. Les métiers à tisser, une fois activés par leur pieds, poursuivent leur mouvement mécaniquement, répétant les motifs à damiers sur une longueur d’1,80 mètres. Dans une salle similaire, des femmes s’appliquent à tisser, avec précision, les motifs complexes de jupes traditionnelles khmères, les sarong. Derrière elles, des enfants jouent parmi les fils de soie et de coton. Une fois au rez-de-chaussée, nous observons le travail minutieux de la vannerie, le lent tissage de joncs pour fabriquer les nattes sur lesquelles les cambodgiens dégustent leur repas.

Centre de développement de Pursat

 

Histoire du centre de Pursat

Mme Em Donna, cheffe du département des affaires féminines de la province de Pursat en 1979 et député lors de la précédente législature, nous accueille et nous fait part de l’histoire de ce centre.

Dans le cadre des fonctions qu’elle occupait à l’époque, elle a rencontré de nombreuses femmes de la province et a rapidement pris conscience des problèmes qui les touchaient. A cette période, la société civile n’était pas développée au Cambodge et aucune ONG n’était présente sur le territoire. A travers ses rencontres, elle réalisa l’omniprésence des violences domestiques envers ces femmes, qui ne bénéficiaient d’aucune indépendance. 

“A cette époque dans la province, les garçons sont envoyés à l’école et les filles sont majoritairement destinées à travailler dans les champs”, nous explique-t-elle. Ces femmes ne pouvaient pas trouver d’autre travail sans éducation, il fallait donc trouver un moyen de créer des emplois pour elles afin qu’elles gagnent leur vie et économisent.”

De 1979 à 1992, le Cambodge est traversé par une guerre civile. Durant cette période Mme Em Donna part se former à l’étranger. Elle se forme professionnellement à la finance et plus spécifiquement aux systèmes de crédit artisanaux et agricoles en Thaïlande, au Bangladesh, au Vietnam et en France.  

De 1986 à 1996, elle travaille aux côtés de l’UNICEF sur des projets liés à l’agriculture au Cambodge. L’un de ces projets vise à former les femmes à l’agriculture vivrière, à entretenir des plantations à côté de leur habitation afin d’économiser de l’argent et soulager leur vie quotidienne. 

Forte de ces apprentissages, elle organise plusieurs rencontres avec les femmes de la province de Pursat. Celles-ci mettent en avant leur volonté de se former à des métiers pour gagner leur propre argent et par là même, leur indépendance. Mme Em Donna engage alors des discussions dans ce sens avec la PNUD et à partir de 1996, bénéficie de financements pour construire le premier bâtiment de l’actuel Centre de développement de Pursat. A cette époque, environ 200 femmes sont formées. 

Face à cette forte demande, Em Donna se tourne vers S.E. Ty Borasy, sénatrice, pour demander des soutiens financiers afin d’agrandir le centre. Le projet est soumis au premier ministre et à partir de 2001 celui-ci est mis en œuvre : le centre est agrandi de plusieurs bâtiments pour atteindre sa taille actuelle. 

Organisation du centre de développement Bun rany Hun Sen

Six formations sont offertes aux femmes dans ce centre, l’ensemble menant à des métiers manuels : la couture, la vannerie (pour produire les nattes cambodgienne en roseau), le tissage (spécialisé dans les krama ou dans les jupes traditionnelles) et la sculpture du marbre – symbole de la province. 

Centre de développement de Pursat

 

De 2012 à 2013, le nombre de femmes dans le centre diminue fortement car beaucoup d’entre elles partent travailler dans les usines. Aujourd’hui, entre 30 et 40 femmes sont formées dans le centre. En moyenne, les formations textiles durent 1 an et de nouveaux apprentissages ont été mis en place comme une formation en informatique de 3 mois, s’adaptant ainsi aux évolutions de la société. 

Les élèves sont présélectionnées par les chefs des communes de la province qui transmettent les besoins au centre. Les femmes bénéficiant des formations sont logées au sein du centre mais les repas ne sont pas pris en charge. 

Avec l’installation d’usines dans la province, beaucoup de femmes y ont cherché un emploi pour obtenir un salaire rapidement, entraînant ainsi la baisse des besoins en formation et la diminution du nombre d’élèves. 

En 2012, la stratégie a évolué par manque de financement. Afin de payer le matériel, l’administration, les formateurs et les producteurs, le centre met désormais en vente les objets produits par ses élèves et cherche de nouveaux sponsors. Une ONG australienne, Quakers Service Australia répond à l’appel. 

Douze centres du même type ont été mis en place au Cambodge, mais celui de Pursat est le seul encore en activité. Quand on interroge S.E. Ty Borasy sur les raisons du succès de celui-ci, celle-ci nous confie à voix basse pour ne pas froisser la modestie “c’est dû à la qualité de la directrice”.

Visiteurs et touristes peuvent découvrir le centre de développement de Pursat et acheter de magnifiques objets traditionnels : vêtements pour tous les âges, krama, sacs, nattes tissées, sculptures… Vous pouvez organiser une visite en téléphonant au 012 824 663 ou par mail : brbscenter@gmail.com.
 

Jeanne Greff

{link} Ce post a été trouvé sur internet par notre rédaction voici la source Source