La tension monte entre la Thaïlande et le Cambodge depuis la mort d’un soldat cambodgien en mai, lors d’un bref échange de tirs dans une zone frontalière contestée entre ces deux voisins d’Asie du Sud-Est.
D’OÙ VIENT LE DIFFÉREND ?
La Thaïlande et le Cambodge se disputent la souveraineté de plusieurs points non délimités le long de leur frontière terrestre de 817 km, une ligne tracée pour la première fois en 1907 par la France, alors puissance coloniale du Cambodge. Cette carte, contestée par la suite par la Thaïlande, reposait sur un accord selon lequel la frontière devait suivre la ligne de partage des eaux naturelle entre les deux pays.
En 2000, les deux pays ont convenu de créer une Commission mixte de délimitation frontalière afin de résoudre pacifiquement les revendications qui se chevauchent, mais peu de progrès ont été enregistrés depuis.
Les revendications sur la propriété de sites historiques ont attisé les tensions nationalistes, notamment en 2003, lorsque des émeutiers ont incendié l’ambassade thaïlandaise et des entreprises thaïlandaises à Phnom Penh, après des propos attribués à une célébrité thaïlandaise remettant en cause la souveraineté du Cambodge sur le temple d’Angkor classé au patrimoine mondial de l’UNESCO.
QUELS ONT ÉTÉ LES PRINCIPAUX POINTS DE TENSION ?
Un temple hindou du XIème siècle, appelé Preah Vihear (ou Khao Phra Viharn en Thaïlande), est au coeur du conflit depuis des décennies, Bangkok et Phnom Penh revendiquant tous deux la propriété historique du site. En 1962, la Cour internationale de justice (CIJ) a attribué le temple au Cambodge, mais la Thaïlande continue de revendiquer les terres alentour.
La tension a grimpé en 2008, lorsque le Cambodge a tenté d’inscrire le temple de Preah Vihear au patrimoine mondial de l’UNESCO, entraînant plusieurs années d’escarmouches et au moins une douzaine de morts, notamment lors d’une semaine d’échanges d’artillerie en 2011.
Deux ans plus tard, le Cambodge a demandé à la CIJ d’interpréter le verdict de 1962. La cour a de nouveau tranché en faveur du Cambodge, jugeant que les terres autour du temple lui appartenaient également et ordonnant le retrait des troupes thaïlandaises.
QU’EST-CE QUI EXPLIQUE LES TENSIONS RÉCENTES ?
Malgré une rivalité historique, les gouvernements actuels de la Thaïlande et du Cambodge entretiennent des relations chaleureuses, en partie grâce à la proximité de leurs anciens dirigeants influents, Thaksin Shinawatra pour la Thaïlande et Hun Sen pour le Cambodge, dont la fille et le fils sont aujourd’hui premiers ministres dans leurs pays respectifs. Thaksin et Hun Sen restent d’ailleurs actifs politiquement.
Cependant, le sentiment nationaliste s’est ravivé en Thaïlande lorsque les conservateurs ont remis en cause, l’an dernier, le projet gouvernemental de négocier avec le Cambodge pour explorer conjointement les ressources énergétiques dans des zones maritimes non délimitées, craignant que la Thaïlande ne perde l’île de Koh Kood dans le golfe de Thaïlande.
Les tensions se sont également accrues en février, lorsqu’un groupe de Cambodgiens, escortés par des soldats, a chanté l’hymne national devant un autre temple hindou ancien, Ta Moan Thom, revendiqué par les deux pays, avant d’être stoppé par des militaires thaïlandais.
La question pose un défi au Premier ministre thaïlandais Paetongtarn Shinawatra, dont le gouvernement fait face à de multiples difficultés intérieures, notamment une économie chancelante frappée par de lourds droits de douane américains.
L’armée thaïlandaise a toutefois durci le ton, se disant prête à mener une « opération de haut niveau » si la souveraineté du pays était menacée, une position plus ferme que celle du gouvernement, qui prône la conciliation.
Paetongtarn a ensuite relayé la position de l’armée, tout en réaffirmant que la priorité de la Thaïlande restait la recherche d’une solution pacifique. Ce double discours illustre l’histoire mouvementée entre la famille Shinawatra, milliardaire, et l’armée royaliste, qui a renversé ses gouvernements en 2006 et 2014.
COMMENT LE CONFLIT EST-IL GÉRÉ ?
Après l’affrontement du 28 mai, les deux pays se sont engagés à apaiser les tensions, à prévenir toute escalade et à rechercher le dialogue via leur commission mixte frontalière, lors d’une réunion prévue le 14 juin.
Les deux voisins ont publié des communiqués diplomatiques promettant la paix tout en réaffirmant leur volonté de protéger leur souveraineté, mais les armées restent mobilisées près de la frontière, faisant craindre une nouvelle flambée de violence.
Le Cambodge, de son côté, estime que les mécanismes existants ne fonctionnent pas et prévoit de saisir la CIJ pour régler les différends dans quatre zones frontalières, estimant que ces « questions non résolues et sensibles » pourraient aggraver les tensions.
La Thaïlande, elle, ne reconnaît pas les décisions de la CIJ dans ce dossier et souhaite une résolution bilatérale du conflit.
{link} Ce post a été trouvé sur internet par notre rédaction voici la source Source