Une innovation pour photographier l’infiniment petit
Une nouvelle machine conçue pour capturer des images d’une netteté extrême pourrait bien révolutionner l’étude des insectes et des cellules. Développée dans le cadre d’un projet scientifique franco-lao-cambodgien à l’Institut Pasteur du Cambodge, cette technologie s’appuie sur le principe du stacking, une méthode de prise de vue par empilement d’images à différentes profondeurs. Le procédé permet d’obtenir des photographies parfaitement nettes de sujets extrêmement petits, comme des moustiques ou même leurs œufs.
« Sur un moustique, on peut aller jusqu’à 3 000 prises de vue », explique Sébastien Boyer, chercheur en entomologie médicale et vétérinaire, impliqué dans le projet. « Pour un animal plus gros, une vingtaine peuvent suffire, mais à cette échelle, il faut une mise au point d’une extrême précision. »
Un appareil en lévitation, ultra-stable et silencieux
L’appareil n’a pas encore de nom, mais il impressionne par ses caractéristiques. Un système de lévitation magnétique élimine toute vibration. « Il faut même couper la ventilation pour éviter le moindre mouvement de l’insecte pendant la prise de vue », précise Sébastien Boyer.
Le traitement d’une seule image mobilise une journée entière de travail, entre la prise de vue et le traitement numérique. « C’est un vrai métier. Il faut compter entre 8 et 10 heures de travail pour une personne », précise Sébastien Boyer.
Un noir absolu et des couleurs parfaitement fidèles
Pour maximiser la qualité de l’image, l’équipe utilise un fond recouvert d’une peinture japonaise brevetée, réputée pour être le noir le plus profond au monde. Ce fond absorbe toute la lumière, assurant un contraste optimal et facilitant l’étalonnage des couleurs. Les clichés obtenus restituent les vraies couleurs, une rareté en photographie scientifique.
Une invention portée par la France
La machine a été conçue par Nathanaël Maury, un inventeur français établi au Laos, ayant déjà mis au point des moteurs électriques pour motos, pour bateaux et une montgolfière 100 % électrique pour le prélèvement d’échantillons en pleine nature.
Le projet a vu le jour grâce au soutien de l’Ambassade de France au Cambodge, dans la continuité du programme VECAM sur l’entomologie vétérinaire au Cambodge déjà porté par l’Ambassade. « Ce fut un grand succès scientifique, avec une forte implication du ministère cambodgien de l’Agriculture et de l’université royale d’Agriculture », souligne Sébastien Boyer.
Une technologie unique au monde, testée au Cambodge
Aujourd’hui, le Cambodge est le seul pays au monde à disposer d’un tel équipement de recherche. « Nous sommes les premiers à l’avoir développé, et les seuls à l’utiliser actuellement dans un cadre scientifique. »
Le dispositif est actuellement en phase de test. L’objectif est de valider et améliorer sa précision pour ensuite le diffuser à l’international, afin que d’autres chercheurs puissent en bénéficier. « On veut savoir s’il tient ses promesses, s’il vaut le coup d’être partagé avec la communauté scientifique. »
Trois objectifs : moustiques, santé, biodiversité
Le projet s’articule autour de trois axes majeurs :
- Créer des clés de détermination pour reconnaître les espèces de moustiques, avec des visuels lisibles et attractifs. Une nécessité quand on sait qu’il existe au moins 320 espèces au Cambodge.
- Valider scientifiquement l’outil, afin qu’il puisse être utilisé par d’autres chercheurs dans le monde.
- Sensibiliser à la biodiversité, en montrant la beauté des insectes, souvent négligés dans les politiques de conservation. D’ailleurs, ce devrait être sous la forme d’une exposition en Septembre et Octobre à l’Institut Français du Cambodge.
Une technologie révélatrice du monde invisible
Au-delà des applications attendues, cette technologie pourrait bien révéler l’inconnu. « On pourrait découvrir des micro-parasites ou des structures inconnues sur les insectes », avance Sébastien Boyer. Ces images soulèveront sans doute de nouvelles questions scientifiques.
Parmi elles : peut-on repérer à l’œil nu les symptômes d’une infection virale chez un moustique ? C’est l’un des enjeux à moyen terme que le chercheur espère explorer.
Une médiathèque numérique ouverte à tous
À terme, l’équipe souhaite créer une médiathèque en ligne pour mettre ces images à disposition du public et des chercheurs. Mais cela nécessite des moyens techniques considérables.
« Ce serait une sorte de bibliothèque numérique de la biodiversité, accessible à tous. Il ne manque plus qu’un partenaire capable d’héberger durablement ce projet », conclut Sébastien Boyer.
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