Entre janvier et avril 2025, le Cambodge a enregistré 2 150 cas confirmés de rougeole, soit plus de trois fois plus que les 666 cas recensés à la même période en 2024. La flambée épidémique touche désormais l’ensemble des 25 provinces du pays. Phnom Penh est la zone la plus affectée (394 cas), suivie de Siem Reap (208) et Kandal (167), selon les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Une campagne nationale de vaccination lancée

Face à l’ampleur de la situation, le ministère cambodgien de la Santé, en collaboration avec l’OMS, a lancé une campagne nationale de vaccination ciblant les enfants de 6 mois à 14 ans. L’objectif est de combler les lacunes immunitaires, particulièrement marquées chez les enfants ayant manqué les vaccins de routine durant la pandémie de COVID-19.

Une tendance régionale préoccupante

Le Cambodge n’est pas un cas isolé. À travers l’Asie de l’Est et le Pacifique, plusieurs pays signalent une résurgence marquée des maladies évitables par la vaccination. Le Vietnam a ainsi rapporté 81 691 cas suspects de rougeole depuis le début de l’année. La Mongolie a enregistré 2 682 cas, et les Philippines, 2 068 entre janvier et mai.

Selon l’OMS, cette flambée reflète un recul généralisé de la couverture vaccinale : entre 2020 et 2023, 3,2 millions d’enfants dans la région n’ont reçu aucune dose de vaccin. À cela s’ajoutent des systèmes de santé sous-financés, une méfiance croissante envers les vaccins, et des perturbations prolongées dues à la crise sanitaire mondiale.

Des enfants laissés pour compte

« La rougeole est l’une des maladies les plus contagieuses au monde. Sa résurgence est un signal d’alarme », a déclaré Dr Saia Ma’u Piukala, directeur régional de l’OMS pour le Pacifique occidental. Il déplore que de nombreux enfants des communautés les plus marginalisées aient échappé aux programmes de vaccination.

June Kunugi, directrice régionale de l’UNICEF, partage cette inquiétude : « Des millions d’enfants sont passés entre les mailles du filet, notamment dans les zones pauvres ou isolées. Nous ne faisons pas que rattraper le retard, nous courons contre la montre. »

La poliomyélite réapparaît en Papouasie-Nouvelle-Guinée

Autre signe inquiétant : deux cas de poliomyélite ont été détectés chez des enfants asymptomatiques à Port Moresby et Lae, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, une première depuis 2018. Des échantillons environnementaux ont également révélé la présence du virus, indiquant une transmission communautaire.

Les autorités relient cette résurgence à des souches circulant en Indonésie, faisant craindre une propagation régionale. « La poliomyélite en Papouasie-Nouvelle-Guinée peut se propager partout dans le monde », a alerté Dr Sevil Huseynova de l’OMS.

Repenser les systèmes de santé

Les experts insistent sur le fait que les campagnes d’urgence sont moins efficaces et bien plus coûteuses que des programmes de vaccination préventive robustes. Or, la rougeole peut entraîner des complications graves (pneumonie, lésions cérébrales, handicap à vie), et la poliomyélite une paralysie irréversible. Les enfants les plus vulnérables sont aussi ceux qui auront le plus de mal à s’en remettre.

« Nous soutenons les campagnes d’urgence, renforçons la surveillance, et aidons les pays à améliorer leurs systèmes de vaccination », a déclaré Nadia Lasri, coordinatrice pour Gavi dans la région. L’enjeu reste de taille : atteindre tous les enfants, y compris dans les zones reculées ou frontalières, et restaurer la confiance dans les vaccins.

Alors que le Cambodge et ses voisins luttent pour contenir ces flambées, les autorités rappellent que les leçons de la pandémie de COVID-19 doivent conduire à bâtir des systèmes de santé plus résilients, capables de protéger durablement les populations les plus fragiles.

La rougeole débute comme un gros rhume : fièvre élevée, toux sèche, nez qui coule, conjonctivite, fatigue. De petites taches blanches dans la bouche (taches de Koplik) peuvent apparaître avant une éruption rouge sur le visage, qui s’étend ensuite au reste du corps. Très contagieuse, la rougeole se transmet par l’air et peut entraîner de graves complications, surtout chez les jeunes enfants et les personnes fragiles.

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