D’après les chiffres officiels dont nous disposons, la dépression toucherait davantage les femmes que les hommes. En 2019, d’après l’Insee, chez les 15 ans ou plus vivant en France métropolitaine, les femmes seraient 12 % à souffrir d’un syndrome dépressif contre 9 % des hommes. « Il existe un visage féminin de la dépression », assure Lucie Joly, psychiatre à l’hôpital Saint-Antoine et Trousseau et enseignante à Paris Sorbonne Université et dans une interview à 20 Minutes, à l’occasion de la sortie de son livre La dépression au féminin (Editions du Rocher). Ce dernier a été co-écrit avec Hugo Bottemanne, psychiatre à l’hôpital Bicêtre et enseignant à l’Université Paris Saclay.
Pour Lucy Joly, les femmes sont plus ouvertes quant à l’expression de leur tristesse et de leur désespoir. Elles sont également plus sujettes aux sentiments d’inutilité ou d’anxiété. Elles auraient en outre davantage tendance que les hommes à présenter des symptômes « dits atypiques » : à dormir et manger plus, à ressentir plus de de sensations douloureuses que d’ordinaire…Les hommes quant à eux exprimeraient leur mal-être plus au travers de la colère, d’addictions ou des comportements de fuite en se surinvestissant professionnellement, sexuellement, sportivement…
Quels facteurs pour expliquer une telle différence ?
Comment expliquer tout cela ? Les bouleversements hormonaux que subissent les femmes sont un facteur de taille dans la dépression féminine. Syndrome prémenstruel, grossesse, dépression post-partum, ménopause, trouble dysphorique prémenstruel (TDPM)… « Le TDPM est un état pathologique qui touche 5 % des femmes avec des symptômes de dépression sévère les jours précédant les règles », rappelle Lucy Joly.
Alors que la plasticité cérébrale permet de répondre aux besoins corporels et aux changements dans l’environnement, celle-ci est influencée par les hormones. « Elles peuvent modifier le profil d’action des neurotransmetteurs, qui sont les molécules chimiques qui permettent la transmission d’information. En association avec les facteurs de stress et de l’inflammation, cela peut participer à l’émergence de troubles psychiatriques chez la femme », explique Hugo Bottemanne.
Mais des facteurs socio-économiques peuvent également jouer. « Lorsque l’on subit de la précarité et de la violence, on a davantage de risques de souffrir de dépression. A titre d’exemple, 30 % des femmes qui sont dans la précarité souffrent de cette pathologie », détaille Lucie Joly.
Pour une approche plus personnalisée de la médecine
Forts de ces constats, les auteurs de La dépression au féminin prônent une approche personnalisée de la médecine en favorisant notamment les essais cliniques sur les femmes. « On a longtemps pensé que les variations hormonales allaient biaiser les résultats mais c’est tout le contraire. En prenant en compte ces variations, on s’assure de mieux les prendre en charge », assure Lucie Joly. Et de rappeler qu’aux Etats-Unis, un traitement agissant sur des récepteurs spécifiques dans la prise en charge du post-partum venait d’être autorisé.
Mais s’il est certain que les femmes sont plus sujettes aux troubles dépressifs que les hommes, les chiffres officiels dont nous disposons pourraient toutefois être légèrement biaisés par le fait qu’elles consultent plus facilement des professionnels de la santé mentale. Les femmes « expriment plus facilement leurs plaintes que les hommes. Elles vont davantage parler de leur souffrance psychique alors que les hommes, eux, vont plutôt pallier leur souffrance à l’aide de la consommation d’une substance psychoactive comme l’alcool ou faire des transgressions. De plus, les dépressions colériques dont souffrent davantage les hommes ne rentrent pas dans la représentation culturelle qu’on a généralement de la dépression et donc elle est parfois mal ou pas diagnostiquée », déclare Hugo Bottemanne.
Quelques symptômes caractéristiques
Afin de pouvoir faire la distinction entre blues passager et dépression clinique et de pouvoir se soigner en conséquences, l’Inserm et la Haute Autorité de Santé ont publié sur leur site une liste de symptômes caractéristiques de cette maladie.
Ils se comptent au nombre de neuf et sont les suivants : une tristesse continue, un désintérêt total envers des activités autrefois favorites, une fatigue perpétuelle, des idées noires récurrentes, une perte d’appétit ou au contraire un rapport compulsif à la nourriture, des difficultés à se concentrer et à retenir les choses, le sentiment de ne pas être à sa place et d’être bon à rien, des troubles physiques (maux de ventre, perte de désir sexuel…) et un ralentissement psychomoteur (vous parlez lentement, vous bougez lentement, comme si tout en vous fonctionnait au ralenti).
Si vous vous reconnaissez dans au moins deux des trois premiers symptômes définis ci-dessus, prenez immédiatement rendez-vous avec un médecin. Pour les patients représentant entre cinq et sept de ces caractéristiques, la dépression est considérée comme légère et modérée. Au-delà de huit, elle est dite sévère.
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