Le Cambodge commémore les victimes du régime khmer rouge

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Ce 20 mai 2025, plusieurs centaines de Cambodgiens se sont réunis au mémorial de Choeung Ek, à Phnom Penh, surnommé « les champs de la mort », pour commémorer les victimes du régime génocidaire des Khmers rouges. Sur ce site devenu symbole de l’horreur, les soldats de Pol Pot ont exécuté des milliers de personnes.

La cérémonie s’est ouverte par des prières, suivies d’une reconstitution dramatique et saisissante des exactions commises entre 1975 et 1979. Des étudiants vêtus de noir, armés de fausses mitraillettes, de couteaux et de bâtons de bambou, ont rejoué les scènes de terreur vécues à l’époque. Une initiative destinée à raviver la mémoire collective et à sensibiliser les jeunes générations.

« J’ai versé des larmes quand j’ai vu leur performance », confie Chruok Sam à l’AFP, 70 ans, qui a perdu douze membres de sa famille. Il espère que ces reconstitutions permettront aux plus jeunes de mieux comprendre ce qu’il qualifie de « régime le plus haineux et cruel sur terre » .

Des récits bouleversants de survivants

Les témoignages de survivants ont rappelé la violence inouïe du régime marxiste dirigé par Pol Pot, décédé en 1998 sans avoir été jugé. Le régime avait pour but de créer une société agraire radicale, bannissant monnaie, éducation et médecine. Résultat : près de deux millions de morts, victimes d’exécutions, de tortures, de famine ou d’épuisement.

Em Ry, 63 ans, présente à la cérémonie, a déclaré à l’AFP qu’elle craignait encore aujourd’hui le régime de Pol Pot. Elle se souvient d’avoir travaillé sans relâche pour une maigre ration : « une simple cuillerée de maïs », dit-elle, ajoutant avoir perdu plusieurs membres de sa famille, dont sa grand-mère.

Tab Sovorn, aujourd’hui âgée de 58 ans, raconte dans des propos collectés par cambodianess avoir été enrôlée à huit ans dans l’unité de travail pour enfants Kong Komar. Chaque matin, elle transportait des pots de latrines plus lourds qu’elle. « Ce n’était pas seulement pour manger que je volais du riz. C’était pour rester en vie. C’était ma façon de résister », confie-t-elle.

De son côté, Him Sean, ancien moine de 25 ans lors de l’arrivée des Khmers rouges, a vu son temple détruit, sa foi bafouée, et a été contraint de travailler dans les rizières. Accusé à tort de trahison, il n’a dû sa survie qu’à l’intervention d’un cadre. « On oublie les moments heureux. Mais on n’oublie jamais la souffrance », dit-il sobrement.

Une journée nationale inscrite dans le calendrier, 50 ans après la chute de Phnom Penh

Autrefois appelée « journée de la colère », cette date du 20 mai a été rebaptisée « journée nationale du souvenir » en 1993, et officiellement inscrite au calendrier en 2018. Elle commémore le début des politiques de collectivisation imposées par les Khmers rouges – des réformes mortelles ayant précipité le pays dans la famine et le chaos.

Cette édition 2025 survient quelques semaines après le 50e anniversaire de la chute de Phnom Penh, survenue le 17 avril 1975.

Le Premier ministre Hun Manet, en déplacement pour l’inauguration d’une cimenterie dans la province de Kampong Speu, a rappelé l’importance de ce devoir de mémoire. « Nous devons avancer, mais nous ne pouvons pas oublier notre passé douloureux », a-t-il affirmé. Il a insisté : « Nous devons continuer à raconter ces histoires, génération après génération – même si cela fait mal. »

Une législation pour protéger la mémoire

En mars 2025, le roi Norodom Sihamoni a promulgué une loi criminalisant le déni des crimes commis par les Khmers rouges, y compris les actes de génocide et crimes contre l’humanité reconnus par les Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (CETC). Toute infraction est punie de cinq ans d’emprisonnement et jusqu’à 12 500 dollars d’amende. Cette loi s’applique à tous les médias, y compris les réseaux sociaux.

Dans le même temps, un décret royal a instauré la création du Remembrance Memorial on Crime and Peace, un mémorial reliant les sites de Tuol Sleng, du centre de détention M13 et des Killing Fields de Choeung Ek.

Le devoir de transmission

Pour les plus jeunes, cette mémoire est un rempart contre les dérives du futur. « Comprendre l’histoire aide à prévenir de futures atrocités », affirme Tann Seavsing, étudiante. Elle croit en la force des témoignages, des films et des récits pour guérir les blessures d’un pays encore marqué par son passé.

Youk Chhang, directeur du Centre de documentation du Cambodge (DC-Cam), abonde :

« L’expérience des CETC nous pousse à poursuivre l’investissement dans la mémoire historique, l’éducation au génocide et la justice au Cambodge ».

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