C’est en Bretagne, à Bréhat, que nous avons rencontré Nathalie Chaboche et Guy Porré, passés d’une carrière dans la tech à la création d’une plantation de poivriers au Cambodge.
Nathalie Chaboche passe tous ses étés sur l’île de Bréhat en Bretagne, mais 6 mois de l’année, elle vit au Cambodge.
Avec son mari, Guy Porré, elle s’est lancée dans la culture du poivre sans en connaître un grain mais avec réussite, grâce au savoir-faire des producteurs locaux.
C’est ainsi qu’est née la Plantation, un lieu mais aussi une marque qui ne cesse de se développer.
Bréhat depuis toujours
Depuis 61 ans, Nathalie Chaboche passe l’été à Bréhat. » j’y suis arrivée pour la première fois en 1961, j’avais 10 jours, j’y ai ensuite passé toutes mes vacances. Deux mois et demi sans aller sur le continent, avec mon cousin Antoine Duléry « .
Le reste de l’année se déroulait en région parisienne mais elle tient à ses racines bretonnes et même ploubazlanecaines du côté maternel. » Un de mes aïeuls est mort en Islande et mon grand-père paternel était propriétaire d’une fonderie à Saint-Brieuc et chef de l’armée secrète des Côtes du Nord « .
Pour les heures plus douces, il y a eu l’île, où sa mère venait régulièrement dans une maison de famille. » Les parents de mon père y louaient une maison depuis 1936 » .
Les parents de Nathalie se sont donc connus sur l’île sous les lampions du 14 juillet. Elle a ensuite, à son tour, converti son mari, Guy Porré qui lui, est d’origine belge.
Depuis, chaque journée de leur été sur le » caillou » commence rituellement par un bain de mer. Puis le travail s’invite. Car le couple vit 6 mois en Asie, 6 mois en Europe dont deux à Bréhat mais n’est jamais complètement en vacances. Peu importe : » Aujourd’hui, nous avons le meilleur des deux mondes « .
Kampot
Même à des milliers de kilomètres, Nathalie et Guy gardent un œil sur ce qui est l’aventure d’une deuxième vie professionnelle, la Plantation est un domaine de 40 ha sur la commune de Kon Sat, dans la province de Kampot, au Cambodge. Ils cultivent, depuis 2013, le célèbre poivre et ils y vivent désormais.
Nathalie Chaboche et Guy Porré ont pourtant découvert l’Asie par hasard et l’agriculture n’a jamais fait partie du plan.
Il y a d’abord eu une carrière dans l’informatique, à Londres, au sein d’un groupe de 22 filiales dont certaines en Chine.
Mais c’est lors d’un voyage de prospection que le destin a bifurqué.
On avait fait la Thaïlande, le Vietnam, on s’est sentis appelés par le Cambodge, on est tombés brutalement amoureux du pays et des gens
Flottait déjà l’envie de « laisser l’informatique aux jeunes » et d’un cadre de vie naturel après la vie citadine. Le charme du pays et de ses habitants a fait le reste.
« Un choc de beauté du matin au soir »
La mer et le golfe de Thaïlande d’un côté, la chaîne de l’Eléphant et la montagne de Bokor de l’autre. « Un choc de beauté du matin au soir ».
Et le projet de faire revivre le précieux poivre sur ce qui était d’abord une friche de 10 ha et en fait quatre fois plus aujourd’hui.
C’était un terrain au bout d’un chemin pas carrossable, on y a été amenés à moto la première fois parce que le taxi ne passait pas
Une aventure, et pour cause : « nous n’avions jamais vu de poivriers » sourit Nathalie. L’agriculture ne s’improvise pas et encore moins l’agriculture tropicale pour des Occidentaux. Ils font appel à M. Heng Keak pour la partie culture. D’origine chinoise, sa famille cultive traditionnellement les poivriers depuis 4 générations.
Chaque planteur garde ses secrets, c’est comme les coins de pêche à Bréhat
« On a pris un risque énorme »
Il a fallu apprendre : « On a pris un risque énorme, le business plan n’était pas du tout adapté » se souvient le couple.
Mais rien n’est laissé au hasard, les analyses du sol révèlent qu’il convient parfaitement à la culture du poivre. Plus de 11 ans après, Nathalie Chaboche et Guy Porré ont acquis la double nationalité et sont propriétaires des terrains.
La Plantation est désormais aussi une marque et propose plus d’une centaine de produits grâce à la création d’une coopérative d’une centaine de fermiers de différentes provinces.
Peu à peu, la production s’est diversifiée avec une vingtaine d’épices même si le poivre reste au centre du projet.
De la culture au packaging, tout est créé en interne. 180 personnes travaillent désormais sur le site d’origine, 220 avec les saisonniers.
L’épice la plus méconnue et la plus utilisée
Une société a été créée en Europe pour l’importation et la distribution.
Désormais, 50 % de la production part à l’exportation, le reste en local, nous avons développé l’export pendant le covid car le pays avait fermé tous les visas touristiques
La Plantation exporte dans 42 pays, sa production est certifiée bio, ISO 2200 et Fairtrade.
Depuis 2016, des visites guidées gratuites sont organisées.
95 % des gens n’ont jamais vu un poivrier alors que c’est l’épice la plus utilisée au monde
50 000 visiteurs découvrent annuellement comment est cultivé et produit le « Château Cheval Blanc du poivre » selon l’expression de Guy Porré.
Une production très liée au terroir et dotée d’une Indication Géographique Protégée. 100 tonnes de poivre de Kampot sont produites par an pour toute l’appellation, 40 % viennent de la Plantation.
Mettre en avant les épices du Cambodge
On l’aura compris, Valérie Chaboche et Guy Porré ne sont pas du genre à s’endormir sur leurs poivriers. Ils fourmillent de projets.
Nous nous intéressons au poivre de Mondol Kiri, au nord-est de Phnom Penh, c’est un poivre peu connu, plus doux que celui de Kampot. On se lance dans sa promotion avec de petites fermes du secteur ; notre projet est vraiment de mettre en avant les plantes et les épices du Cambodge trop méconnues à notre goût, en partenariat avec les producteurs locaux
Outre la boutique sur place, deux autres sont ouvertes à Kampot et Phnom Penh et une ouverture est prévue dans la ville des temples d’Ankor. Sur place, le couple a aussi développé l‘agrotourisme : restaurant, cours de cuisines, chambres d’hôtes… Un bar à épices est aussi en projet.
En France, les produits de la Plantation sont distribués dans les épiceries fines, mais aussi à la Cale aux épices à Paimpol. « Christophe Lemaire est l’un des grands spécialistes français du poivre » apprécie le couple.
Et bien sûr, les produits de la Plantation sont en vente à l’épicerie de Bréhat…
« Un projet qui est aussi social »
« Les Cambodgiens nous ont énormément apporté, on s’est sentis redevables vis-à-vis du pays, car certes, nous avons apporté les fonds mais les Cambodgiens sont exceptionnels dans l’exécution. C’est pourquoi nous avons voulu donner à la Plantation un caractère social affirmé, c’est la force motrice du projet » indique Nathalie Chaboche. Cela passe par une aide dans le domaine de l’éducation. « Nous n’allions pas monter une ferme et laisser l’école du village dans l’état où elle était, c’était incohérent ».
» La force motrice du projet «
Depuis 11 ans, l’entreprise finance donc un salaire complémentaire au professeur. « Nous assurons aussi le suivi de scolarité dans le secondaire dans une école privée pour les meilleurs élèves. Ça implique notamment, la prise en charge du transport scolaire car le village est à 20 km de Kampot. » Depuis 11 ans, trois jeunes sont arrivés à l’Université, un parcours que nous finançons aussi « .
« On s’est sentis redevables vis-à-vis du pays »
Pour cela, une association a été créée pour collecter des fonds « mais ça ne couvre pas l’ensemble des dépenses qui, en totalité se monte à 100 000 $ par an pour le volet éducation ».
Par ailleurs, l’entreprise a aussi fait bénéficier le village de l’accès à l’eau potable et à l’électricité.
Certifiée « Fairtrade », La Plantation a choisi d’avoir une production durable ce qui oblige à respecter une série de critères économiques, environnementaux et sociaux vérifiés par un organisme indépendant. « Nos salaires sont bons ; le salaire minimum dans le pays est de 150 $, nous sommes à 250 $ plus trois repas par jour, la sécurité sociale, un 13è mois et un plan retraite, c’est un régime exceptionnel ».
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