Fondation Claim Gran Petro. Un tribunal néerlandais estime que l’utilisation du mécanisme d’ancrage simplement pour éviter des procédures brésiliennes tardives dans une demande de dommages-intérêts subséquente constitue un abus de procédure.

Les lecteurs réguliers seront conscients que discipliner l’utilisation du mécanisme d’ancrage du défendeur n’est pas une tâche facile à entreprendre pour un tribunal (j’ai lié à un article, mais la balise de recherche « ancre » vous mènera à beaucoup). La CJUE adopte une position restrictive. Bien qu’en l’espèce l’article 8, paragraphe 1, Bruxelles I bis ne s’applique pas formellement (le mécanisme ne s’applique pas aux défendeurs domiciliés en dehors de l’UE), les règles résiduelles néerlandaises indiquent qu’elles doivent être appliquées comme le ferait A8, paragraphe 1.

Dans Stichting Claim Gran Petro c. Shell Pays-Bas, Shell Brasil et Raizen ECLI:NL:RBDHA:2023:7099, le tribunal de première instance de La Haye a cependant refusé sa compétence à l’encontre du seul défendeur brésilien (Raisen), ancré dans deux entités Shell néerlandaises (Shell maintenant ayant déménagé son domicile exclusivement en Angleterre a eu lieu [5.2] non pertinente en raison du principe de perpetuatio fori), invoquant l’abus du mécanisme du défendeur d’ancrage.

Shell détient une participation majoritaire dans Raisen. Les demandeurs ont essentiellement fait appel à la structure d’entreprise de Shell et, par inspiration, espéraient convaincre le tribunal que l’hypothèse de l’implication des sociétés mères dans les manigances anticoncurrentielles de leur fille pourrait suffire à justifier le lien entre les réclamations. Une telle hypothèse existe dans le droit de la concurrence de l’UE (voir par exemple CJUE ENI) mais le tribunal estime que les demandeurs n’ont pas été en mesure de prouver un équivalent brésilien.

La Cour se réfère notamment à CJUE CDC v Azo Nobel et al pour souligner la condition selon laquelle le mécanisme d’ancrage ne doit pas avoir pour seul objectif d’éloigner le défendeur en cause de son for de domicile naturel. [6.7] le tribunal rapporte que les demandeurs reconnaissent que la juridiction néerlandaise est sollicitée pour des raisons de retard général des procédures brésiliennes. Rien n’indique que Raizen ne sera pas disposé à faire face à de futurs dommages. Considérant qu’il n’existe aucune présomption en droit brésilien d’implication de la société mère et qu’aucune preuve de l’implication factuelle des entités mères de Shell n’a été fournie, [6.16] le tribunal conclut que le mécanisme d’ancrage en cause est une application abusive et ne doit pas conduire à la compétence.

Geert.