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Cambodge: « l’enfer » des travailleurs piégés dans des centres d’arnaque en ligne

, Cambodge: « l’enfer » des travailleurs piégés dans des centres d’arnaque en ligne

Au Cambodge, des milliers de victimes de la traite des êtres humains vivent un « enfer » dans des centres aux allures de prison destinés à l’escroquerie en ligne, un business juteux et opaque que les autorités, longtemps accusées de laxisme, essayent de combattre.

Ces dernières années, la ville portuaire de Sihanoukville (sud-ouest) est devenue l’eldorado des arnaqueurs sur internet, qui emploient de force des milliers de travailleurs des quatre coins de l’Asie attirés par les fausses promesses d’une vie meilleure.

Captivité, actes de tortures… Ces personnes vivent un « enfer », a relevé fin août Vitit Muntarbhorn, le rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’Homme au Cambodge.

La pandémie a forcé des dizaines de casinos proches de réseaux criminels internationaux, privés de leur clientèle, à se reconvertir dans l’arnaque en ligne.

Leur principale combine ? Inciter les victimes, via de faux profils sur les réseaux sociaux, à investir dans les cryptomonnaies sur des sites frauduleux – une escroquerie appelée en anglais « pig butchering » (dépeçage des porcs).

« Il n’y a aucune transparence financière », explique à l’AFP Jeremy Douglas, représentant régional pour l’Asie du Sud-Est à l’Office des Nations unies contre les drogues et le crime.

« Mais dans toute l’Asie-Pacifique, des gens sont arnaqués, et certains des chiffres sont stupéfiants », poursuit-il.

– « Torturés et vendus » –

Selon M. Douglas, la traite des êtres humains concerne « des milliers, voire des dizaines de milliers » de travailleurs asiatiques employés de force, battus et privés de leur passeport, réunis dans des sites fermés par des barreaux aux fenêtres et des fils barbelés pour les dissuader de s’échapper.

Des complexes de bâtiments sans âme d’une douzaine d’étages, où se mélangent bureaux et chambres, ont essaimé le long du littoral de Sihanoukville, déformant l’ancienne station balnéaire tranquille.

« Quand ils arrivaient dans le complexe, ils ne pouvaient plus repartir », assure à l’AFP un membre d’un gang installé dans la ville, sous couvert d’anonymat.

« Les gens étaient battus ou torturés et vendus s’ils refusaient de prendre part aux arnaques », affirme-t-il.

Les victimes interrogées par l’AFP évoquent les privations d’eau, de nourriture et de lumière, pendant des heures.

« Ca ressemblait à un bureau normal », décrit Roy, 38 ans, un Malaisien d’origine chinoise qui n’a souhaité donner que son prénom, mais « une fois que tu commences, tu comprends que tu ne fais pas dans le service client ».

« Ils demandent à quelqu’un de s’allonger et ils le frappent, comme un chien. Parfois, une décharge électrique, un coup de pied, et une autre décharge. Ils le battaient pendant cinq à dix minutes », se rappelle celui qui a vécu quatre mois l’enfer de Sihanoukville, avant d’être secouru par une ONG.

– Descentes de police –

L’opacité de ces structures dans une zone grise de la loi, impliquant des actionnaires cambodgiens et chinois parfois proches des élites au pouvoir, rend difficile leur traçage par les autorités locales.

Mais l’attention grandissante portée à la question, alimentée par des épisodes spectaculaires, comme l’évasion de dizaines de travailleurs vietnamiens qui ont traversé à la nage la frontière entre le Cambodge et le Vietnam en août, a mis la pression sur les autorités.

Le Cambodge, accusé par les Etats-Unis de laxisme quant à la traite des êtres humains, a mené plusieurs opérations de police de grande envergure à Sihanoukville.

Plus de 1.000 étrangers libérés, 9.000 téléphones portables saisis, ainsi que 800 ordinateurs, des menottes et du matériel pour infliger des décharges électriques: une descente en septembre dans trois centres a donné une première idée de l’ampleur du problème.

Après des mois de laisser-faire de le part du gouvernement, le Premier ministre cambodgien Hun Sen a lancé une chasse contre les cerveaux de ces activités criminelles.

Le pays qui compte parmi les plus corrompus de la planète aura besoin d’une « énorme volonté politique » ainsi que de « l’attention et de l’aide soutenues de la communauté internationale pour gérer cette forme de criminalité nouvelle, et particulièrement cruelle », note Jason Tower, de l’Institut de la paix des Etats-Unis.

– Des travailleurs bloqués au Cambodge –

Arrivé de Changzhou (Chine) à Sihanoukville sur la promesse d’un ami de gagner 2.000 dollars par mois sur un chantier, Lu, un trentenaire qui n’a souhaité donner que son prénom, fait partie des travailleurs libérés après une opération de police – il est resté piégé moins d’un mois.

Aujourd’hui, il attend de pouvoir rejoindre sa femme et leur enfant en Chine.

S’il a réussi à éviter le centre d’immigration, où les conditions sont difficiles selon des médias locaux, son avenir reste dans l’impasse.

« L’ambassade de Chine ne m’a dit qu’une chose: +les adultes doivent assumer leurs propres décisions+ », déplore-t-il.

Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a rappelé que Pékin « demande toujours aux citoyens chinois à l’étranger de se conformer aux lois locales et de ne pas s’engager dans toutes sortes d’activités illégales. »

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