Cambodge: le parti d’opposition dissous

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«Personne n’est surpris. Tout le monde sait que le gouvernement et l’appareil judiciaire ne font qu’un. Tout cela a été préparé à l’avance», a réagi l’analyste politique cambodgien Meas Ni dès la publication du jugement. De fait, après les amendements aux lois sur les partis politiques en juillet pour permettre la dissolution d’un parti si son leader a été condamné et l’arrestation pour «complot» de Kem Sokha en septembre, la disparition du parti d’opposition était presque acquise. Dith Mundy, le président de la Cour suprême qui a prononcé le jugement jeudi, fait partie du comité permanent du Parti du peuple cambodgien du premier ministre Hun Sen, dont il est un ami proche.

Détruire l’opposition

Outre la dissolution du CNRP, le jugement interdit d’activité politique pour cinq ans 118 membres dirigeants du parti, dont de nombreux députés, et limoge les 489 chefs de commune inscrits sur les listes du parti qui avaient été élus lors des élections communales de juin dernier.

Cette offensive politique de Hun Sen, une sorte de Mugabe asiatique qui est le plus ancien chef de gouvernement en Asie, s’explique par la crainte de perdre les prochaines élections législatives, prévues en juillet 2018. «Le gouvernement a fait effectuer des enquêtes d’opinion par un institut étranger et le résultat a été clair: le parti de Hun Sen ne peut pas gagner. Leur seule option est donc de détruire l’opposition», confiait récemment une politicienne du CNRP. Cela d’autant plus que perdre le pouvoir pour Hun Sen, sa famille et ses alliés voudrait aussi dire mettre en péril la fortune qu’ils ont accumulée au cours des dernières décennies.

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Les Etats-Unis ont réagi via un communiqué, appelant le Cambodge à «annuler ses récentes mesures» contre le principal parti d’opposition, et «à libérer le dirigeant du CNRP, Kem Sokha, et à permettre aux partis d’opposition, à la société civile et aux médias de maintenir leurs activités».

Dénonçant «un retour en arrière du développement démocratique» du Cambodge, les Etats-Unis ont annoncé qu’ils allaient mettre un terme au soutien apporté au Comité électoral national cambodgien. Dans le contexte actuel, «l’élection de l’année prochaine ne sera ni légitime, ni libre, ni juste.»

Revirement de l’opinion publique

En détruisant le parti d’opposition, Hun Sen peut peut-être espérer une victoire électorale l’an prochain. Mais cela ne garantit pas pour autant la pérennité de son pouvoir. «Ce n’est pas la fin de la démocratie au Cambodge. Le CNRP a disparu, mais pas le mouvement démocratique.

Il y a trois millions de personnes qui s’opposent au parti de Hun Sen au Cambodge», affirme Meas Ni. La corruption omniprésente dans les milieux dirigeants, l’exploitation massive des ressources naturelles par des firmes liées au gouvernement, l’accaparement des terres des paysans et la répression des ouvriers du secteur textile (70% des exportations du Cambodge) ont provoqué depuis les élections de juillet 2013 un revirement d’opinion au détriment du parti gouvernemental au sein de la population.

Le rapprochement politique et économique du Cambodge avec la Chine a aussi diminué l’effet des injonctions des pays occidentaux sur l’importance du maintien de la démocratie et du respect des droits de l’homme. D’autant plus que le nouveau président américain, Donald Trump, ne semble pas passionné par ces questions. Dimanche dernier, il posait tout sourire avec Hun Sen devant les photographes lors d’une rencontre régionale à Manille. Un contraste saisissant avec l’extrême réserve dont l’ex-président Barack Obama faisait preuve vis-à-vis du leader cambodgien.

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