Agent orange : Tran To Nga, 83 ans de combat contre le poison américain

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Plus de 5 millions de personnes touchées et des millions d’hectares de forêt et de mangrove détruits. L’agent orange, un défoliant épandu par l’armée américaine lors de la guerre du Vietnam, continue de ravager le pays : cinquante ans après le conflit, des bébés naissent encore avec d’horribles malformations et de nombreux Vietnamiens sont atteints de cancers et autres maladies chroniques. Les États-Unis bénéficiant d’une immunité de guerre, plusieurs procès ont visé les multinationales productrices de l’herbicide, parmi lesquelles l’inénarrable Monsanto, Hercules ou Dow Chemical. Mais, ces dernières se cachent derrière le gouvernement américain pour ne pas être inquiétées.

Quatre-vingts millions de litres déversés

La tête de proue de cette lutte pour la reconnaissance et le dédommagement des millions de victimes est Tran To Nga, qui poursuit depuis des années une dizaine de firmes en justice. Malgré ses 83 ans, la Franco-Vietnamienne continue sa vie de résistance. À 22 ans, dans les années 1960, elle arpente les chemins de la piste Hô Chi Minh, le maquis de la résistance vietcong. En proie aux maladies et aux minuscules sangsues qui se glissent sous ses vêtements, elle progresse en pleine jungle et escalade des montagnes avec ses camarades, un sac de 25 kg sur le dos, à la merci des bombardiers américains.

Un jour, l’un d’entre eux « laisse dans le ciel une traînée de poudre qui tombait très vite, raconte-t-elle. Je me suis retrouvée avec un liquide gluant sur moi, j’ai tout de suite toussé. On m’a dit d’aller me baigner, mais j’ai eu la gale les jours suivants ». L’exposition au défoliant la poursuivra toute sa vie : elle contracte plusieurs cancers et d’autres maladies, qu’elle transmet à ses filles. « Quatre-vingts millions de litres ont été déversés entre 1964 et 1975 », rappelle Alain Bonnet, du comité de soutien à Tran To Nga, dont le « combat est catalyseur et fédérateur de cette lutte ».

Cette lutte franchit une nouvelle étape en 2021. Devant le tribunal judiciaire d’Évry, la militante fait face au mépris de la « horde d’avocats » – ils étaient une trentaine – des multinationales. « Madame Tran To Nga, vous n’avez que les maladies que les femmes de votre âge ont ! » lui lancent-ils, avant de lui refuser un droit de réponse. « Cela prouve qu’ils ont peur de la vieille dame qui est à côté d’eux », rétorque-t-elle avec malice. Finalement, le tribunal judiciaire statue que les entreprises auraient agi sous la contrainte du gouvernement états-unien. Une immunité de juridiction qui est une « thèse fictionnelle », selon Me William Bourdon.

« Le défoliant était vingt fois plus dangereux que le pesticide qui était utilisé dans les jardins américains »

Me Bertrand Repolt

« Les Monsanto papers, des rencontres avec les vétérans et des conversations téléphoniques nous prouvent que les multinationales ont été plus royalistes que le roi, elles ont inventé la dioxine », affirme l’avocat. « On sait qu’elles ont été libres dans la fabrication, la composition et la production du défoliant, abonde son collaborateur, Me Bertrand Repolt. Elles ne peuvent pas se cacher derrière les États-Unis pour cette immunité de juridiction. » Cette défense des grands groupes agrochimiques agace Kim Vo Dinh, du collectif Vietnam dioxine. « Le défoliant était vingt fois plus dangereux que le pesticide qui était utilisé dans les jardins américains, détaille-t-il. Pour faire plus de bénéfices, ils ont même augmenté la toxicité du produit ! »

Un rassemblement place de la République, ce samedi 4 mai, à 14 heures

Après le verdict de l’appel du mardi 7 mai, qui sera rendu à l’automne, les avocats de Tran To Nga sont prêts à se pourvoir en cassation, et même à saisir la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). « Les droits internationaux, européen et français sont de notre côté, reprend William Bourdon. La fin des immunités est un mécanisme archaïque. » Quant à l’octogénaire, elle est prête à repartir au front contre les Goliath des pesticides : « Ils ne me feront jamais de cadeau. Mais, soyez-en sûr, du haut de mes 83 ans, je ne perdrai pas courage, jusqu’à mon dernier soupir. »

La pugnacité de Tran To Nga puise sa source chez sa mère, active au sein de la résistance. De 1957 à 1959, cette dernière est déportée au terrible bagne de Poulo Condor, dont le simple nom fait courir un frisson sur l’échine des Vietnamiens. Les bagnards y subissent des « séances de torture à toute heure du jour et de la nuit, fers aux pieds, dans des cachots exigus au plafond grillagé, ces fameuses cages à tigre où il fait une chaleur à crever », raconte sa fille dans sa biographie, Ma terre empoisonnée. Et quand les femmes sont mises au cachot, « l’endroit grouille de vers, empeste les excréments, (…) la gale, les poux, la saleté mettent les détenues au supplice ».

Elle en ressortira, combative comme sa fille. « Je n’ai pas l’habitude de pleurer sur mon sort. La vie est ainsi faite, surtout la nôtre, qu’il faut lutter, c’est tout », écrit Tran To Nga après avoir perdu sa première-née, Viêt Hai, âgée de quelques mois et victime d’une malformation du cœur. Lutter, qu’importent les bombes, les maladies, l’adversité, jusqu’à réunir des milliers de personnes, ce samedi 4 mai à 14 heures, sur la place de la République, à Paris. Toutes et tous la soutiendront dans son combat contre l’impérialisme, pour la justice, les droits humains et l’environnement, au pied de la statue de Marianne.

Si les soutiens à Tran To Nga seront si nombreux ce samedi 4 mai, c’est aussi grâce à la mobilisation du collectif Vietnam Dioxine, qui a inondé les réseaux sociaux pour sensibiliser au combat de la vétérane. Et cette dernière sait « qu’une fois disparue, la jeunesse continuera de se battre pour obtenir justice pour les victimes de l’agent orange, au Vietnam et dans les autres pays ».

La « jeune armée » de To Nga est composée de femmes et hommes – d’origine vietnamienne ou non – qui n’ont découvert que récemment la catastrophe de l’agent orange. C’est le cas de Kim Vo Dinh, qui en a entendu parler dans les années 2000. « C’était un double choc, non seulement ce drame est horrible, mais en plus on n’était pas au courant », explique-t-il.

Micheline Pham, la vingtaine, a entendu parler de l’écocide en 2021 : « C’est quelque chose que je ne connaissais pas du tout, pourtant je suis fille d’immigrée vietnamienne. » Comme elle, beaucoup de membres du collectif viennent des luttes écologiques, indignés des ravages du défoliant sur les sols d’Asie du Sud-Est. « Notre combat n’est pas isolé, il s’inscrit à l’intersection de plusieurs luttes, continue-t-elle. On était à la marche antiraciste, on soutient très fortement le peuple palestinien, la transition écologique évidemment, etc. » Ou quand la jeunesse veut son devoir de mémoire.

Si les soutiens à Tran To Nga seront si nombreux ce samedi 4 mai, c’est aussi grâce à la mobilisation du collectif Vietnam Dioxine, qui a inondé les réseaux sociaux pour sensibiliser au combat de la vétérane. Et cette dernière sait « qu’une fois disparue, la jeunesse continuera de se battre pour obtenir justice pour les victimes de l’agent orange, au Vietnam et dans les autres pays ».

La « jeune armée » de To Nga est composée de femmes et hommes – d’origine vietnamienne ou non – qui n’ont découvert que récemment la catastrophe de l’agent orange. C’est le cas de Kim Vo Dinh, qui en a entendu parler dans les années 2000. « C’était un double choc, non seulement ce drame est horrible, mais en plus on n’était pas au courant », explique-t-il.

Micheline Pham, la vingtaine, a entendu parler de l’écocide en 2021 : « C’est quelque chose que je ne connaissais pas du tout, pourtant je suis fille d’immigrée vietnamienne. » Comme elle, beaucoup de membres du collectif viennent des luttes écologiques, indignés des ravages du défoliant sur les sols d’Asie du Sud-Est. « Notre combat n’est pas isolé, il s’inscrit à l’intersection de plusieurs luttes, continue-t-elle. On était à la marche antiraciste, on soutient très fortement le peuple palestinien, la transition écologique évidemment, etc. » Ou quand la jeunesse veut son devoir de mémoire.

Si les soutiens à Tran To Nga seront si nombreux ce samedi 4 mai, c’est aussi grâce à la mobilisation du collectif Vietnam Dioxine, qui a inondé les réseaux sociaux pour sensibiliser au combat de la vétérane. Et cette dernière sait « qu’une fois disparue, la jeunesse continuera de se battre pour obtenir justice pour les victimes de l’agent orange, au Vietnam et dans les autres pays ».

La « jeune armée » de To Nga est composée de femmes et hommes – d’origine vietnamienne ou non – qui n’ont découvert que récemment la catastrophe de l’agent orange. C’est le cas de Kim Vo Dinh, qui en a entendu parler dans les années 2000. « C’était un double choc, non seulement ce drame est horrible, mais en plus on n’était pas au courant », explique-t-il.

Micheline Pham, la vingtaine, a entendu parler de l’écocide en 2021 : « C’est quelque chose que je ne connaissais pas du tout, pourtant je suis fille d’immigrée vietnamienne. » Comme elle, beaucoup de membres du collectif viennent des luttes écologiques, indignés des ravages du défoliant sur les sols d’Asie du Sud-Est. « Notre combat n’est pas isolé, il s’inscrit à l’intersection de plusieurs luttes, continue-t-elle. On était à la marche antiraciste, on soutient très fortement le peuple palestinien, la transition écologique évidemment, etc. » Ou quand la jeunesse veut son devoir de mémoire.

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